CAHIER
DE DOLÉANCES DES PRÉVÔTÉS BAILLIAGERES
DE SARREBOURG ET DE PHALSBOURG
INTRODUCTION
Chapitre
II - Les Cahiers
2.
FORME.
Les cahiers de doléances des deux prévôtés, dont
les originaux sont conservés aux Archives départementales de Meurthe-et-Moselle
sont au nombre de 29 et se décomposent ainsi : deux des villes, 24
des communautés rurales, un du Clergé, un de la Noblesse, et
un cahier général du Tiers état des deux prévôtés.
Ces
cahiers sont écrits en français, excepté celui de Vilsberg qui est
en allemand. La plupart ont une orthographe déplorable.
Tout en respectant les nombreuses incorrections de langage et de style
qui laissent vraiment à désirer, nous avons adopté, dans notre publication,
l'orthographe moderne, même pour les noms propres des lieux, en mettant
toutefois entre parenthèses les noms tels qu'on les écrivait à la
fin du XVIIIe siècle. Nous avons également copié les noms propres
de personnes et leurs prénoms, tels qu'ils se trouvent dans le texte
des procès-verbaux ou dans les signatures qui les suivent : ils fournissent
un élément intéressant pour ceux qui s'occupent de la prononciation
courante et du langage local de nos villages à cette époque.
Toutefois, les greffiers n'ont pas toujours écrit les noms propres
de personnes de la même façon ou comme les écrivaient ceux
qu'ils désignaient (15).
Plusieurs
cahiers sont rédigés dans un français pitoyable, difficile à lire
et surtout difficile à comprendre, soit parce qu'ils sont mal écrits,
soit parce que la ponctuation y manque presque entièrement
ou y est fantaisiste.
La cause ordinaire de ces défectuosités est à chercher non
seulement dans le manque d'instruction, mais aussi dans le fait que
ces villages, où avait vécu pendant des siècles une
population parlant la langue allemande, ne sont devenus français qu'en
1661.
Sans doute, les colons amenés par le gouvernement à la fin du XVIIe
siècle, de la Picardie, de la Champagne, du Vermandois, de la Bourgogne
et d'autres provinces, parlaient le français, mais ils ne furent pas
les seuls à s'établir dans le pays dévasté par la guerre de Trente
ans.
A l'est de Sarrebourg, un certain nombre d'habitants revinrent dans
leurs foyers ; d'anciens soldats recrutés en Allemagne, en Suisse,
dans le Tyrol, se joignirent à eux après leurs années de service :
tout ce monde parlant l'allemand, la langue officielle n'a pas gagné
beaucoup de terrain.
Le résultat fut qu'à l'approche de la Révolution les villages
situés à l'est de Sarrebourg parlaient uniquement l'allemand,
comme c'est encore le cas aujourd'hui. Le français n'était donc d'un
usage courant que dans les villages de Bébing, Héming et Imling,
et dans les quatre "exclaves" situées plus à l'ouest,
Donnelay, Gelucourt, Juvelize et Lezey.
Il est donc tout naturel que quelques cahiers se plaignent de ce que
les ordonnances royales ne soient publiées qu'en français et qu'on
les réclame dans les deux langues, comme cela se faisait en Alsace,
afin d'éviter les dépenses d'une traduction (Danne). Danne-et-Quatre-Vents,
Haselbourg et Hommarting, le Tiers état des deux prévôtés demandent
(§ 37), "avec instance que toutes les ordonnances et règlements
leur soient adressés tant en idiome français qu'allemand, attendu
que la majeure partie de ces communautés ignorent la langue française".
(15)
Citons quelques exemples : Les nobles de Verilhac ou Verlhac, de Lauthier
Chabanon, de Sainctignon, d'élvert (D'Elvert) ont été nommés
par un des greffiers : Deverlach, de Lothier Chabanon, de Saint-Ignon,
Delvert ; le curé Marc est appelé : Marc et Marx, etc...